Mai/Juin

Samedi 28 mai
A la veille du redouté référendum, je me dore, avec ma BB, dans l’immense jardin (ou le petit parc !) de maman et Jean. J’en ai bouffé à satiété du débat sur le sujet, des analyses journalistiques, de la confrontation politique. Rien à faire, je ne trouve aucun attrait aux arguments des Non. Le summum du grotesque revient à la grosse vache blondasse fille de Le Pen, qui tiendrait un rôle plus en phase au rayon charcuterie d’une surface assez étendue pour l’accueillir. Comment un père comme Le Pen, dont on ne peut contester la vivacité intellectuelle, peut-il cautionner cette relève creuse, au timbre de voix irritant, à l’inanité argumentative ? Piètre représentation de l’extrême droite annonciatrice peut-être d’une dégénérescence par absence de leader potable. Vers la gauche, la Buffet donnait l’impression d’une antienne mal maîtrisée, d’un leitmotiv oublieux des interpellations d’en face. Les communistes ayant tout refusé de la construction européenne depuis 1957, quelle crédibilité peut avoir leur Non ? Ce n’est qu’une posture idéologique sans une once de construction viable sur les ruines de ce qu’ils auront contribué à exploser, bien contents de reprendre un peu de vigueur… en trompe l’œil. Les prochaines élections les rabougriront à nouveau à leur portion réelle.
A cette triste bande de démolisseurs, rajoutons l’escroc de Villiers qui, lors du débat sur France 2, a ressorti son ignoble chiffon rouge pour angoisser davantage, et abusivement, les Français. Parce qu’il a vu cité le nom de la Turquie dans l’acte final, cela équivaudrait à une entrée automatique de ce grand pays en cas d’adoption du traité. Pitre malhonnête que Cohn Bendit ne se gênera pas d’apostropher. Aussi couillon que de prétendre que la signature des témoins, dans un acte de mariage, les lieraient au couple dans un impensable quatuor matrimonial. Avec ce genre d’argument, comme celui d’Emmanuelli mettant en garde les Françaises sur une remise en cause du droit à l’avortement par ce traité décidément infâme, la clique du Non révèle sa démarche fallacieuse, opportuniste et criminelle pour la construction européenne. Et le pire, c’est qu’une majorité d’électeurs risque d’aller dans leur sens. Dès le 30, nous verrons cette victoire du vide, avec chaque partisan du Non, ramener la couverture du scrutin à lui. Aucune position commune pour cette association malfaisante, hormis celle du piétinement de ce subtil compromis institutionnel. Qu’ils aillent au diable !
Curieux hasard, ce matin, sur le quai du TGV, je croise maître Vergès, tout gris, et quelques heures avant, une radio m’informe de la mort de maître Varaud, l’un des plus brillants et des plus respectés avocats de sa génération qui avait assuré, avec panache, la défense de Maurice Papon, toujours vivant.

Lundi 20 juin
De retour à Lyon pour une petite semaine avant de petites vacances au Cellier. Emma et François se sont passés l’anneau d’or au doigt pour officialiser leur ère duale. Deux jours festifs dans un gîte accueillant avec les membres des deux familles. Le bon enfant a primé sur les caractères de chacun pour faire de ces instants un doux délire joyeux et mesuré.
Découverte de quelques personnalités : la complexe de Richard, le compagnon de Louise, a retenu l’essentiel de la chauffe neuronale. Penchant à prolonger les convivialités arrosées jusqu’à l’ivresse en solitaire.
Depuis le tchou tchou rapide, la luxuriance des paysages ne peut laisser augurer les inconséquences de notre ivre humanité acharnée dans ses frénétiques perditions. La verdoyance hexagonale ne peut masquer les égoïsmes délétères de chacun, prêt à sacrifier le bien commun pour pérenniser, à sa pauvre échelle, les facilités acquises, et surtout ne pas se sentir bridé dans la satisfaction de ses maîtres envies. Primauté de la courte vue ou, pire, reconnaissance des traumatismes globaux avec, pour les plus pernicieux, un prosélytisme pseudo écologique en s’accordant les dérogations les plus étendues pour que rien n’entache le confort dans un système sociétal pourtant critiqué. Le crime contre l’individualité dressé pour parasiter toute révolution efficace de nos modes de vie contraint les plus lucides d’entre nous à hurler dans l’insane étroitesse de nos volontés perdues (ou jamais atteintes). L’addition de nos renoncements pourrait bien générer la gestion à rebours d’une survie menacée. Pompe habituelle des alarmistes masturbatoires ? Si seulement…

Jeudi 23 juin
 La Victoire du Vide !
Surtout ne pas émettre une seule critique contre les bons citoyens. Leur mécontentement est plus que jamais légitime et on ne peut qu'admettre la voix des urnes... Texte trop compliqué (alors pourquoi s'embarrasser de le consulter ce bon pôple), trop libéral (un modèle du genre à côté du traité de Nice, c'est évident !), incapable de répondre aux aspirations de perfection égocentrique... Savatons tout, en se moquant des incongruités argumentatives qui, de l'extrême droite à l'extrême gauche, ont joué des peurs comme jamais ! Le tableau apocalyptique français n'est plus tolérable ? Que le bon pôple aille voir dans les tranchées insalubres de nombre de contrées...
Que notre pays est devenu frileux, replié sur lui-même, encombrés de petits vieux avant l'heure... et bien qu’ils en bouffent du nationalisme social à la Besancenot... avec ses grands soirs pour pendre du possédant. Quelle puissance d'action que ces Buffet et Bassine Le Pen : le bazar de l'hôtel de passe politique est né...
Et surtout, que l'on supprime tout notre commerce extérieur pour pouvoir mettre en oeuvre cet isolement salutaire pour notre économie moribonde. Et que l'assistanat généralisé continue à creuser sous nos caisses, vides depuis belle lurette.
Et vive la France rance !

Samedi 25 juin, 19h env.
De retour au Cellier, une semaine après le mariage d’Emma et François. Nous les retrouvons ce soir pour un dîner à trois couples et la découverte des plus de cent photos prises pour ce moment festif.
Huit jours de repos avec ma BB dans cette région aux montées de mercure plus modestes, et bien plus vivables qu’à Lyon.
Mon site Indignation a dépassé les 500 visites et je renouvelle régulièrement les extraits de mon Journal calibrés comme des articles, des instantanés d’humeur, des fulminations sans retenue.
Dernièrement, je me suis essayé à l’écriture directe à l’ordinateur, sans passer par la plume, au lendemain de la déferlante du Non, La Victoire du vide révélatrice surtout d’une inquiétante montée du nationalisme social. Une bonne part de la gauche, et pas seulement de l’extrême, si encline à donner à tout va des leçons de morale, d’humanisme et de générosité vient, en filigrane vicieux, de se retrouver dans le vieux discours lepéniste du « travail aux Français ».

Dimanche 26 juin
A l’ombre d’un arbre, dans le jardin venté des parents B, un ciel au bleu laiteux pour confortable toit, je laisse s’échapper idées et impressions que je voudrais fixer. A trente-cinq berges bien entamées, je n’ai toujours pas l’abondance scripturale naturelle. Se forcer à noircir ces pages pour atténuer le leurre d’une existence… 
Einstein aurait lui cent ans, et la vivacité de son empreinte lui confère la pérenne jeunesse. Poursuivre jusqu’au bout ses projets, identifier ses inspirations et en former un apport incontournable dans le domaine choisi : voilà une vie à sens. Le reste n’est que remplissage accessoire.Reste le champ des sentiments qui me réserve quelques bornes d’attache essentielles à l’équilibre. Ma BB au-dessus de tout, bien sûr, mes parents de sang et de cœur (maman-Jean ; papa-Anna), ma grand-mère adorée pour sa gentillesse, son courage et son amour de la vie malgré les terribles épreuves de la grande vieillesse, les frères qui partagent quelques affinités avec moi (Jim et sa compagne Aurélia, Alex et Raph), la chaleureuse famille B, quelques amies fidèles et leur compagnon éventuel, Karl et Sally enfin, seules personnes de l’univers actuel ou ancien de Heïm avec lesquelles un lien subsiste. Voilà, en résumé, ma contrée affective aux frontières fluctuantes. Modestie du champ relationnel qui favorise l’exploitation infinie des vagabondages intérieurs.
Car les compagnons d’une route ne se limitent pas à ses contemporains bien vivants. Le peuple des ombres adorées prend une part grandissante le temps passant : le mien demeure restreint, la vie m’ayant encore préservé des pertes traumatisantes par leur insulte à l’ordre naturel. Je garde dans mon cœur l’image sobre, parfois bourrue, mais si attachante de mon grand-père maternel, ce cher Gustave avec qui j’aurais voulu partager quelques conversations intimistes. Je cultive, par ce que papa peut m’en dire (et Heïm à une époque, reconnaissons-le), le souvenir de ma grand-mère paternelle, cette chère Madame Decrauze au beau nom préservé de l’extinction. Au second plan, je garde le souvenir ému du grand-père/papa de Sandre, Jean R., avec qui j’ai partagé un an durant quelques dizaines de conversations complices. Voilà tout. Un cimetière du cœur bien réduit finalement et que j’espère (vainement) garder à cette taille le plus longtemps possible.
Enfin, je n’oublie pas la troupe des artistes, musiciens et écrivains avant tout, qui nourrissent mon temps de vie d’une si transcendante façon. Un peu à l’image de la théorie des cordes pour l’explication universelle, la vie affectivo-spirituelle se complexifie de multiples dimensions simultanées qui varient selon le champ d’oscillations de ses pensées. Parmi ces créateurs, vivants ou morts, que je ne croiserai jamais mais dont l’apport équivaut (et parfois dépasse) une affection ou une amitié, mon inclination me porte d’abord vers quelques musiciens-interprètes dont les mélodies, et parfois les paroles, m’imprègnent et fondent une bonne part de cette beauté enchanteresse du monde, un peu comme le paysage sonore de ce jardin estival. Mes incontournables piliers de la chanson française : Brassens le maître talent dans l’irrévérence poétique, Brel l’impétueux, Lapointe l’attachant, Nougaro le débordant, Gainsbourg dans ses débuts, Aznavour et quelques joyaux, Jonasz en douceur jazzée, Mitchell et Lavilliers en virile créativité. Quelques sonorités agréables avec l’inquiet de Palmas, le suave Daho, le feu groupe lyonnais L’Affaire Luis Trio, et c’est à peu près tout pour la musique hexagonale.
La niaiserie des paroles ne devait pas entraver mes penchants mélomanes. La solution : rester imperméable à l’anglais et se passionner pour le son anglo-saxon. De là, un suivi fidèle de quelques artistes auxquels je tiens verser de l’argent (manifestation prosaïque mais sincère de mon goût pour leurs œuvres) pour posséder leurs créations musicales : Al Jarreau aux modulés vocaliques uniques, Sting l’intarissable talent (un Kubrick ou un Spielberg de la musique), le groupe Coldplay de récente constitution mais aux envolées enivrantes, Björk la fascinante, George Michael pour sa rythmique et ses ondulations vocales, Seal la transparence inspirée, Kravitz le rocailleur mélodique, Sade l’envoûtante, Omar qui swingue sans pareil, Supertramp indémodable, U2 encore meilleur le temps passant, Morrissette, Texas et Corrs pour la vivace féminité et quelques autres que l’instant me fait oublier.
A ce Panthéon musical, je dois rajouter ma galerie des jazz qui se colore des plus généreuses personnalités : d’Armstrong à Fitzgerald, de Bechet à Holliday, de Reinhardt à la jeune Norah Jones, de Mc Ferrin à Mingus, etc. Joyeux défilé de cuivres, de cordes vocales et à gratter, pincer, effleurer, de virevoltantes blanches et noires, de trépidantes percussions et de clarinettes prolixes.
A cette maestria de notes s’ajoutent quelques plumes qui m’illuminent par la musicalité de leur style et la justesse de leurs raisonnements. Le roman m’emmerde généralement, c’est donc vers les écrivains du réel et de la pensée que mes fidélités se portent. Avant tout le compagnon Léautaud qui a partagé des milliers d’heures avec moi, à travers la lecture de son Journal littéraire, de ses autres écrits, mais aussi par mes propres pontes lui étant consacrées. Heïm, écrivain à part dans mon cœur, conséquence des affections partagées, puis de l’éloignement choisi, des désillusions l’un sur l’autre, de cette vie curieuse qui m’a fait partager l’existence, pendant quelques années, d’un de mes écrivains préférés. 
La phase critique qui anime ces pages envers le microcosme passé de Heïm ne peut me faire renoncer à mes goûts littéraires. Ce que je regrette, pour mon enrichissement intellectuel, c’est que mon détournement de sa forme d’existence et de ses actions professionnelles m’ait, de fait, détourné de ses oeuvres. Seul le temps me réconciliera avec la partie littéraire du personnage.

Pour combler mes appétits subsistent tout de même quelques brillantes figures : l’accrocheur Artaud, le cataclysmique Céline, le tonitruant Bloy, l’incisif Jean-François Revel, le complexe Nietzsche pour les plus présents.
Panorama rassurant de l’intérêt porté à une parcelle du monde, car pour le reste la nausée émerge très vite. Cela fera l’objet d’un instantané prochain.

Lundi 27 juin
20h. De retour de Pornic, après une journée estivale, mais sans l’envahissement des touristes qui ne débutera que la semaine prochaine. Crêpes salées, sucrées, baignade et bronzette : un bonheur simple appréciable.
Début de soirée quelque peu étouffante qui confirme la tendance pré-caniculaire et notre perte progressive du climat tempéré. Si cette voie climatique se systématise dans les prochaines décennies, cela constituera la première vraie sanction à notre forme inconsciente de civilisation. L’observation des comportements attriste tant l’écart entre les bienfaits techniques et les instincts d’appropriation se creuse.
La prime à la crassouille, l’opportunisme comme éthique, l’illusoire frime des branleurs comme des grincheux, l’égoïsme absolu des foireux de tout acabit, la part navrante des échoués fiers de leurs dernières acquisitions (auto, vidéo, technico…) : catalogue signe des déviances banalisées. Je ne vais pas faire mon misanthrope primaire avec toutes les simplifications afférentes pour me rassurer sur la légitimité de mes indignations. Pas trop inspiré pour ce remplissage forcé. Me manque la verdeur et la perspective. Rien à construire, à proposer qui justifie mes fulminations. Plus de sens dans ma modeste dimension existentielle.
Peu écrit en 2005 : tarissement des thèmes, assèchement des élans littéraires.

Mardi 28 juin
Une journée en duo avec ma BB sans se fier aux élucubrations météorologiques. En l’attendant à l’ombre d’un arbre, je goûte au petit vent salvateur.
La mollesse de l’ordre établi vient de faire une nouvelle victime dans la région Bretagne. La réquisition de vastes terres pour que s’ébrouent les teuffeurs (que foutre de l’orthographe qui les désigne !), quarante mille branleurs décérébrés, a incité l’un d’entre eux ou un malade local à égorger une jeune fille de dix-huit ans du coin ! A dégueuler toutes ses tripes sur ces foireux trépidants. Encore une fois, comme le dopage dans le sport, le prétendu lieu commun de drogards et de fournisseurs en stupéfiants truffant ces rassemblements sauvages (mais désormais cautionnés par les pouvoirs publics) s’avère être la sordide réalité. Toutes ces faces d’autruches plongées dans leurs décibels à gesticulations ne veulent surtout pas qu’on leur parle de responsabilité passive de ces dérives. Là pour teuffer, bien sûr !
Le vide du nationalisme social se confirme. Rien à l’horizon des partisans du Non, si ce n’est l’imbécile braquage contre le libéralisme auquel aspirent les pays émergents. Et surtout qu’on ne les soupçonne pas de rejet des autres pays, bien sûr que non : si ce n’est qu’on ne veut pas de leur concurrence ! Alors quoi ? On les veut dans un bocal et claquer des doigts pour que, miraculeusement, ils atteignent notre niveau social. Naïveté puérile ou hypocrisie tactique ?
Par ailleurs, le fait d’avoir manifesté un mécontentement pour de toutes autres raisons que celle du projet constitutionnel doit désormais vacciner les gouvernants pour toute nouvelle consultation.
En écoutant une émission sur France Inter, je me rends compte de l’aberration d’avoir requis l’avis du bon pôple ! Chacun s’est fait ses questions et ses réponses pour rejeter un texte qu’une infime minorité a réellement lu. Triste spectacle de ce gâchis lorsqu’on pousse au bout les motivations des grincheux qui voudraient encore plus d’assistanat et un fonctionnariat gonflé jusqu’à l’implosion du système.
Bonne nouvelle, Iter sera implanté dans les Bouches-du-Rhône. Les intégristes écologistes, alias les Pisseurs verts (Greenpeace en anglais), rejettent un projet qui permettrait de sortir du nucléaire avec deux avantages déterminants : des déchets à durée limitée (trente ans environ) et une sécurité accrue (plus de risque d’explosion). Des têtes à claques qu’il conviendrait d’engluer dans le pétrole qui permet de faire avancer leur flottille parasitaire. Au bout de leurs contradictions pour qu’ils baissent leur tronche arrogante.

Mercredi 29 juin
Fond de l’air plus frais, alors qu’à Lyon l’étouffant se prolonge.
La semaine de vacances touche à sa moitié. Délassement et repos sans transcendance notable. Je ne parviens pas encore à me fondre dans cette convivialité débordante et chaleureuse des B. Mon inextinguible trouble de la socialisation parasite périodiquement mon attitude.
Ce matin, en trempant mes tartines, une émission traitait de la perception de la nudité des adultes par les enfants. Un traumatisme enfoui, mais durable, peut suivre l’épreuve du regard sur les organes génitaux de ses parents. De ce côté, mes parents ont eu l’attitude exemplaire : le respect des intimités sans néfaste décontraction. En revanche, chez Heïm, au nom de je ne sais quelle théorie pionnière de l’éducation, j’ai confronté mes timidités (plutôt normales à la préadolescence) envers le corps féminin aux dénudements, côté seins, des jeunes filles présentes. Une scène me revient au hasard de la mémoire : après-midi estivale au château d’O ; déjeuner à l’arrière sur la grande pelouse sur de petites tables de jardin. A celle de Heïm, Alice sa fille en pleine adolescence et aux formes déjà épanouies. Le temps d’aller chercher du pain dans la cuisine et je retrouve cette sœur de cœur la poitrine à l’air, sur demande incontestable de Heïm. La vue de ces deux mamelons d’albâtre aux tétons bien roses et dressés, associés au visage de cet être familier adoré (voire désiré en secret) m’a pour le moins décontenancé, poussant ma gène au point ultime. Bien sûr ces scènes me fournissaient les images fantasmagoriques pour mon onanisme frénétique.

Jeudi 30 juin

Le ciel étant incertain, nous partons une journée en Vendée à la découverte d’un musée consacré aux chouans et aux crimes de la Terreur. Souvenir de mes jeux royalistes où j’incarnais George Cadoudal, Karl Jean Cottereau et Hermione Jean-Nicolas Stofflet à la chasse des Bleus à saigner. Ce trio enfantin me reste comme le meilleur de ce passage au château d’O : intense complicité de deux garçons et une fille de l’année 69, affection développée par les multiples jeux partagés, imagination débordante pour nourrir nos gourmandises ludiques, l’affirmation progressive de nos caractères préadolescents sans fragilisation de nos liens. Voilà tout le positif de ce partage dans un cadre unique, féerique. Quel dommage que la dimension apportée par Heïm se charge de peu reluisantes dérives.
Tous les sujets mènent à Heïm ? Impression de ces dernières pages. Un T.O.C. littéraire ? No Comment.
19h. Edifiante après-midi vendéenne, après un gustatif passage à l’Auberge du lac. On peut tirer à boulets rouges sur le de Villiers souverainiste jusqu’à la mauvaise foi, mais reconnaissons la qualité de son empreinte dans la gestion du département de Vendée et la mise en valeur de sa période tragique. Du mémorial de Vendée aux Lucs, jusqu’au Logis de la Chabotterie, nous découvrons l’horreur génocidaire des soldats de la République « une et indivisible », comme il est indiqué au bas du décret officialisant l’appel à la destruction de la contrée et à l’éradication de sa population, femmes et enfants en tête.
Le martyr des Lucs et de ses habitants exterminés dans l’église rappelle sans effort Oradour-sur-Glane, ni plus ni moins. Le projet de la Convention a juste manqué des évolutions technologiques dont a bénéficié le nazisme pour sa funeste entreprise. Les intentions sont tout autant barbares, criminelles, jusqu’aux boutistes avec cette détermination idéologique à supprimer une communauté humaine pour son appartenance religieuse ou prétendument raciologique. Comment notre République n’a-t-elle pas plus fortement rejeté cette part sombre de sa naissance ? Comment peut-elle laisser sur son Arc de Triomphe le nom d’un général sanguinaire, le bourreau Turreau, en charge de ce crime contre l’humanité, ni plus ni moins coupable qu’un Himmler si ce n’est par l’ampleur du projet… mais la Vendée aurait compté cent fois plus de rebelles et Turreau aurait eu à disposition les raffinements techniques des nazis, le quantitatif ne serait pas un argument des camoufleurs de la sale histoire révolutionnaire. Démonstration de ce révisionnisme cautionné par l’Etat républicain : André me sort un Précis d’histoire pour le brevet élémentaire de 1932, œuvre d’une « réunion de professeurs » et qui limite ce drame à une « guerre » entre rebelles (terroristes dirait-on aujourd’hui) et républicains. Fi des acharnements exterminateurs contre la population civile vendéenne.

Aucun commentaire: